L'entraînement progressif en force rétablit la force musculaire du quadriceps et des ischio-jambiers dans les 7 mois suivant la reconstruction du LCA chez des joueurs de football amateurs

Welling et al.

Physical Therapy in Sport

Volume 40, November 2019, Pages 10-18

Ce qu il y a à savoir:

  • Les joueurs de football après ACLR ont montré une force musculaire similaire à 7 mois par rapport aux témoins.
  • Soixante-cinq pour cent des joueurs de football après ACLR ont dépassé LSI> 90% pour la force musculaire du quadriceps à 10 mois.
  • Les joueurs de football après ACLR ont montré une bonne fonction autodéclarée du genou à 10 mois.

L’une des principales composantes de la rééducation précoce après la reconstruction du ligament croisé antérieur (RCAAC) au football est la restauration de la force du quadriceps et des ischio-jambiers avant le début de la rééducation sur le terrain et du retour au sport (Della Villa et al., 2012).
On a suggéré que la force musculaire du quadriceps symétrique avant le RTS était associée à une réduction du risque de nouvelle blessure (Kyritsis, Bahr, Landreau, Miladi, Ω Witvrouw, 2016; Grindem, Snyder-Mackler, Moksnes, Engebretsen et Risberg, 2016). ).

En outre, il a été rapporté que la force musculaire du quadriceps était associée à une bonne fonction autodéclarée du genou et à la satisfaction du patient après le ACLR (Logerstedt et al., 2014). Il est courant de calculer un indice de symétrie des membres (LSI) pour la force du quadriceps et des ischio-jambiers, défini comme la force musculaire maximale de la jambe blessée divisée par la force musculaire maximale de la jambe non blessée x 100 (Lynch et al., 2015). Pour déterminer l’état de préparation au RTS, les critères LSI> 90% sont souvent utilisés comme scores seuils (Lynch et al., 2015).

 

L’objectif principal de la présente étude était de comparer les résultats d’un protocole de musculation pour les joueurs de football après ACLR avec des témoins en bonne santé, et d’étudier les effets du protocole de musculation sur les pics de quadriceps et de muscles ischio-jambiers. joueurs après ACLR avec greffe HT et BPTB dans le quadriceps maximum et la force des muscles ischio-jambiers au cours de la rééducation après ACLR. L’hypothèse était la suivante: les joueurs de football après ACLR montraient après la formation des forces maximales comparables pour le quadriceps et les muscles ischio-jambiers ainsi que des valeurs de LSI après l’entraînement par rapport aux témoins sains.

En outre, il a été émis l’hypothèse que la force maximale du quadriceps et des muscles ischio-jambiers s’améliorait considérablement avec le temps, de même que la fonction autodéclarée du genou résultant de l’entraînement en force.

Enfin, il a été supposé que les joueurs de football après ACLR avec greffe HT présentaient une plus grande force musculaire maximale du quadriceps et une force musculaire maximale inférieure du jarret par rapport à ceux ayant une greffe de BPTB.

Strength data of the soccer players after ACLR and the control group.
Limb Symmetry Index values of the soccer players after ACLR

Les principales conclusions de l’étude actuelle sont que les joueurs de football sept mois après ACLR n’ont montré aucune différence significative entre le pic de quadriceps et la force musculaire des ischio-jambiers par rapport au groupe témoin. À 10 mois, les joueurs de football après ACLR étaient plus forts que le groupe témoin. En outre, 65,8% des joueurs de football après ACLR ont dépassé LSI> 90% à 10 mois pour la force musculaire du quadriceps et 76,3% pour la force musculaire des ischio-jambiers. De plus, la fonction du genou autodéclarée a progressé avec le temps.

La découverte secondaire a montré que les joueurs de football avec un ACLR avec BPTB montraient une plus grande force musculaire du muscle ischio-jambier à 4 mois, 7 mois et 10 mois par rapport aux joueurs de football avec un ACLR avec HT. De plus, des valeurs plus élevées de LSI pour la force musculaire du quadriceps chez les joueurs de football avec un ACLR avec greffon HT ont été trouvées à 7 et 10 mois par rapport à un ACLR avec une greffe BPTB.

L’augmentation absolue de la force musculaire du quadriceps chez les joueurs de football après ACLR était de 33,3 à 34,8 Nm par incrément de temps de trois mois, ce qui est similaire au MDC de 33,9 Nm pour la force musculaire du quadriceps (Kean et al., 2010). Ces résultats indiquent une amélioration clinique importante de la force musculaire du quadriceps de 4 à 7 mois et de 7 à 10 mois après le LCR-LC.

La force des muscles quadriceps symétriques est suggérée comme essentielle pour une stratégie RTS sans danger, car elle réduit considérablement le taux de nouvelle blessure (Grindem et al., 2016).

La force musculaire asymétrique du quadriceps est associée à une biomécanique altérée du genou lors des tests fonctionnels, ce qui a été mis en évidence comme facteurs de risque de nouvelle lésion du LCA (Palmieri-Smith & Lepley, 2015). En outre, il est suggéré que la faiblesse du quadriceps est un facteur de risque de développer une arthrose du genou (Palmieri-Smith & Lepley, 2015).

Les résultats montrent qu’en utilisant les principes de l’entraînement progressif en force, les joueurs de football ayant subi un ACLR retrouvent une force musculaire comparable à celle d’un groupe de contrôle du quadriceps et des ischio-jambiers comparable à celle de témoins en bonne santé sept mois après l’ACLR. À 10 mois, les joueurs de football après ACLR étaient plus forts que les témoins sains. De plus, 65,8% des joueurs de football après ACLR et 76,3% pour la force des ischio-jambiers dix mois après l’ACLR ont réussi à dépasser le LSI> 90% pour la force musculaire du quadriceps.

De plus, les joueurs de football après ACLR ont montré une bonne fonction autodéclarée du genou 10 mois après ACLR. Ces résultats mettent en évidence le potentiel de l’entraînement en force progressif en rééducation après ACLR qui pourrait atténuer les déficits de force communément rapportés. Les physiothérapeutes doivent s’attacher à améliorer la qualité de la rééducation après le LCA, en mettant en œuvre un entraînement en force plus progressif.

Strength data of the soccer players after ACLR and the control group.

L'analyse de Thomas

Cette étude propose un programme de réhabilitation musculaire analytique du quadriceps et des ischios. Ce programme peut être considéré comme efficace car la majeure partie de la population a retrouvé 90% des capacités athlétiques 10mois post- op. Afin de donner une comparaison un peu plus concrète, nous avons au sein de la population opérée à la clinique de la Sauvegarde (LYON 09), un déficit moyen de 15% sur le pic de force du quadriceps et de 8% sur les pics de force des ischios, côté opéré par rapport au côté non opéré à 6mois post-op (n=100 patients, sportif régulier, pas de référencement spécifique concernant les centres de rééducation). Nous pouvons ainsi constater une cohérence des résultats.

Toutefois, si la méthode chirurgicale est celle qui semble offrir les meilleures garanties pour recouvrer une stabilité suffisante du genou et envisager un « retour au sport », nous devons garder à l’esprit que le risque de re-rupture de la plastie varient de 6 à 25% selon les études Wiggins 2016. Egalement d’aprés Gerometta en 2014 « Seulement 56% des patients reprennent le sport à 1 post-op, malgré de bons résultats cliniques et une force musculaire normale sur l’ensemble du panel (n=239) ».

La récupération de force chez nos sportifs ou non sportifs est un facteur essentiel mais ne doit pas être considérée comme unique objectif.

Par exemple, nous savons aujourd’hui, même si elles sont parfois remises en cause, que les directives fonctionnelles lors de la réhabilitation ont été identifiées comme des facteurs susceptibles d’influencer la récupération et donc d’influencer le risque de re-rupture (Ross 2002).

L’isocinétisme est l’outil d’évaluation de cette étude en proposant un test isocinétique concentrique quadriceps et ischio à 60°/s sur 4 répétitions. Cette méthode d’évaluation explore les capacités de force et, est donc en adéquation avec la recherche proposée dans l’étude. Toutefois les paramètres d’évaluation choisis sont pour ma part un peu restreints. Par exemple, nous savons qu’en isocinétisme (méthode d’évaluation employée dans l’étude) , un ratio mixte faible (pic de force Excentrique IJ/ concentrique Quadriceps), multiplie par 4 le risque de lésion des ischio-jambiers [Croisier et al., Am J Sports Med, 2008.] Le rapport excentrique étant également référent sur l’état qualitatif de la zone de prélèvement pour un didt. Malheureusement le paramètre excentrique des ischios n’est pas évoqué. Par expérience, un bon pic de force, en travail de force, n’est pas forcément corrélé avec un pic de force excentrique. Ainsi nous pouvons rester interrogatif sur la récupération des ischios dans ce mode de travail.

Également la recherche des capacités endurantes (au moins 15 répétitions) et explosives (240°/s par exemple), me semble être indispensable pour évaluer pleinement l’efficacité du protocole de renforcement.

Je ne suis pas surpris des déficits résiduels à 10mois concernant le quadriceps pour les KJ et les ischios sur les DIDT. Le but de la chirurgie est de trouver les méthodes les moins invasives possibles tandis que la récupération complète des zones lésées est le défi majeur de la rééducation. Généralement la reprise des activités physiques est de 6mois, peut-être faudrait-il un délai plus long ou une meilleure efficacité des protocoles de réhabilitation ?

Barber-westin et Noyes en 2011 expose la nécessité d’une force musculaire isocinétique ≥ 80% de récupération pour un retour au sport après opération alors que la référence LSI du sujet sain est de 90%. Cela témoigne bien de la prise de conscience des séquelles possibles post-opératoires. Également, je suis pleinement d’accord sur l’importance de la motivation du patient. Sur ce sujet un travail pluridisciplinaire joue un rôle primordial. En effet, le chirurgien, médecin, kiné, réathlétisation, prépa physique, coach & coéquipiers vont constituer une équipe thérapeutique dont la cohésion et l’expertise permettra, selon nous, la réussite de l’opération à long terme.

THOMAS CHAMU

Diplômé MK en 2009, Thomas exerce à la clinique de la sauvegarde service Orthopédique du membre inférieur depuis 2012. Il est reconnu pour ses compétences dans l’évaluation isocinétique et fonctionnelle du genou.

Depuis 2011, thomas intervient en tant que kiné au sein de l’équipe de france de hockey sur glace. Il est également formateur au sein du diplôme Kiné-ProSport de K-LYF.